10 février 2025

L’agent gourmand (suite et fin)

Reouven confie Ă  un agent immobilier la vente de sa maison au prix de 2,000,000 chequels. Ce dernier rĂ©ussit Ă  lui trouver un acheteur pour 1,950,000 chequels. L’affaire est conclue et la maison est vendue. Peu de temps plus tard, Reouven le raconte Ă  son ami Chimon qui parait Ă©tonnĂ©. Celui-ci explique qu’une semaine plus tĂŽt, il a proposĂ© Ă  ce mĂȘme agent d’acheter cette maison au prix offert, mais que l’agent avait refusĂ© l’offre et demandait un prix plus Ă©levĂ©. Plus tard, l’agent avoue Ă  Reouven qu’il ne l’avait pas mis au courant de cette proposition, car cet acheteur lui avait promis une commission supĂ©rieure Ă  la normale.

Reouven se rend alors au Beth Din et pose les trois questions suivantes :

1)Est-ce un ‘mĂ©ka’h taout’ [une vente faite par erreur], et Reouven peut-il donc annuler la vente ?

2)Si non, l’agent doit-il lui payer la perte qu’il lui a causĂ©e [50,000 chequels] ?

3)Doit-il payer la commission de l’agent?

RĂ©ponse:

Le Ran rapporte le cas de quelqu’un qui confie les kidouchine d’une femme Ă  un envoyĂ© ; en d’autres termes, il envoie quelqu’un Ă  sa place donner Ă  la femme la somme nĂ©cessaire (ou la bague) pour l’épouser. Si elle accepte d’épouser l’envoyĂ© (car elle ignore qu’il n’est qu’un envoyĂ©), le mariage est valide. En effet, elle n’a pas prĂ©cisĂ© qu’elle ne l’épousait que par dĂ©faut mais que si elle avait le choix, elle aurait prĂ©fĂ©rĂ© Ă©pouser l’envoyeur. Ce n’est pas un « MĂ©ka’h Taout » , une transaction erronĂ©e. De mĂȘme, le vendeur aurait pu refuser de vendre Ă  1,950,000 chequels s’il avait su qu’il y avait un autre acheteur potentiel.

Certains Poskim [‘Houkei ‘Hayim q. 5] disent que Reouven est en droit d’annuler cette vente Ă  cause de la tromperie de l’agent immobilier, « hataya » . À ce cas s’applique la loi de la GuĂ©mara concernant quelqu’un qui vend ses biens dans l’intention d’aller habiter en Erets IsraĂ«l. S’il ne parvient pas finalement Ă  s’y rendre, il peut annuler la vente.

D’autres poskim disent que non. La diffĂ©rence tient au fait que dans le cas de la GuĂ©mara, la condition (son dĂ©part pour Erets IsraĂ«l) a Ă©tĂ© prĂ©cisĂ©e par le vendeur au moment de la vente alors que dans notre cas, Reouven n’a pas prĂ©cisĂ© Ă  l’acheteur qu’il n’avait trouvĂ© aucun autre client pour le prix de 2 000 000 chequels, bien qu’il l’ait pensĂ©, comme le prĂ©cise le Choul’han ‘Aroukh (207,4), car ce sont des « dĂ©varim chĂ©balev » [conditions non exprimĂ©es].

PrĂ©cisons que ce din s’applique mĂȘme si Reouven n’est pas intervenu directement dans la vente, et que nous ne pouvons donc pas lui reprocher d’avoir omis cette prĂ©cision. Pourquoi? Car le Knesset Haguedola, Hagahot Beth Yossef (207, 67), tranche que le din de la GuĂ©mara concernant celui qui veut se rendre en Eretz IsraĂ«l s’applique mĂȘme la vente se fait par un intermĂ©diaire.

En conséquence, Reouven ne peut pas annuler la vente.

Affaire à suivre la semaine prochaine


Cette rubrique est Ă©crite par l’institut « Din vĂ© Michpat Â»

sous l’égide du Rav Its’hak Belhassen oĂč siĂšgent des Dayanim francophones

Conseil et orientation juridique en droit juif, hĂ©ritage divorce et partage

Litiges  – Traitement de questions pĂ©cuniaires – RĂ©daction de contrats et testaments

Rav Aaron Cohen  (054.85.910.55   *dinvemichpat@gmail.com